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des lieux du pouvoir – Eric Aupol

Des lieux du pouvoir
Eric Aupol

Exposition personnelle du 22 avril au 10 juin 2023

 

 

 

« je m’avance une fois de plus le long de ces couloirs, à travers ces salons, ces galeries, dans cette construction d’un autre siècle … » *

 

 

vues de l'exposition, des lieux du pouvoir, Eric Aupol ©Fabrice Robin
vues de l'exposition, des lieux du pouvoir, Eric Aupol ©Fabrice Robin

Photographier des lieux du pouvoir, l’un au 121 boulevard Haussmann l’autre au 126 rue de l’Université à Paris.
Photographier ces espaces vides, mettre à jour les différentes strates qui les peuplent et qui nous sont révélées comme une mémoire en chantier. Pas de mise en scène, seulement la saisie de ces espaces momentanément délaissés, privés de leur fonction et de leur usage, de ce qui en fait des lieux de pouvoir. Il ne reste à notre regard que le silence et l’absence, la puissance semble mise à défaut, ce sont les coulisses que les photographies d’Eric Aupol révèlent, le théâtre du pouvoir lorsqu’il est en sommeil.

Eric Aupol a toujours utilisé l’outil photographique pour nous montrer ce que l’on ne peut pas observer à l’œil nu. La rigueur géométrique du cadrage agence le réel et les espaces comme des tableaux qui révèlent les mémoires successives de ces lieux chargés de l’Histoire et de représentations du pouvoir. Le velouté du grain photographique, le jeu subtil des reflets et de la lumière donnent une incroyable esthétique à l’ensemble de cette nouvelle série.

 

Les cadrages, souvent frontaux, induisent une distance dans ce qui ne pourrait être qu’une topographie d’un espace. L’échelle n’est pas immédiatement donnée au spectateur, renforçant peut-être la théâtralité des lieux et des prises de vues.

Ce rapport intime avec l’espace évoque la promiscuité spatiale. Lorsqu’Eric Aupol veut rendre compte des espaces d’accueil, de passage, ou de travail, ces lieux ordinaires, dont tout indique qu’ils sont davantage traversés, ou occupés de façon très provisoire, il choisit alors des fragments, des détails, des espaces de silence, de mémoire, des espaces d’après mais aussi d’avant, des objets que l’on entrevoit souvent de façons partielles ou détournées du regard frontal.

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Le passé de ces lieux visités, n’a aucune réalité en dehors de l’instant où il est évoqué avec assez de force, et, en devenant le présent, comme s’il n’avait jamais cessé de l’être. Les traces enregistrées sur ces photographies sont comme les témoignages des événements passés et présents dans ces lieux, mais elles n’en seront jamais les dernières.  

 

*Première phrase du film de Alain Robbe-Grillet de Alain Resnais «L’année dernière à Marienbad »

vues de l'exposition, des lieux du pouvoir, Eric Aupol ©Fabrice Robin
vues de l'exposition, des lieux du pouvoir, Eric Aupol ©Fabrice Robin
vues de l'exposition, des lieux du pouvoir, Eric Aupol ©Fabrice Robin

Au premier abord, avec l’idée de photographier des lieux de pouvoir, on peut se laisser tromper par une fallacieuse impression d’académisme …c’est un piège .

 

Chez Eric Aupol, les apparences sont toujours fausses. L’idée de mettre en images une thématique autour des Lieux du pouvoir – en 2021, l’ancien siège d’une banque bd Haussmann et, en 2022, le Palais Bourbon qui abrite l’Assemblée nationale et de son théâtre à l’italienne – confirme l’unicité de sa démarche qui, depuis des années, s’attache à explorer dans toutes ses variables un matériau proche dans sa forme d’un environnement architectural.

 

Eric Aupol réussit magistralement à définir la notion même de l’existence d’un lieu de pouvoir. Avec la Banque, on est encore saisi par le poids d’austérité et presque de dissimulation qu’abritent encore ces murs. Et si l’Assemblée nationale devrait être le lieu parfait de représentation de la démocratie, on y découvre aussi, certes recouverts partiellement de bâches en plastiques, des figures de violence comme cette statue d’Eugène Cavaignac, gouverneur d’Algérie en 1848qui inaugura le 11 juin 1844, la pratique des enfumades sur les populations locales ou encore, plus banal, un Napoléon toujours en majesté.

 

De ces lieux, Eric Aupol aime à faire surgir le moindre mystère. Ses clichés investissent les escaliers, les différentes salles, les promenoirs, le moindre recoin. Le monde de l’artiste ne peut se satisfaire que de saisir quelques bribes. Il se veut au contraire envahissant, fruit d’une réflexion opiniâtre, menée avec une rare passion et de longue date. La rigueur géométrique du cadrage, presque toujours frontal, le velouté du grain photographique, le jeu subtil des reflets et de la lumière renforcent la puissance de l’esthétique de chacune des images qui se complètent, s’enrichissent et se parlent. On est là face à un travail photographique de grand talent, très méticuleux, imaginatif, presque obsessionnel avec des juxtapositions, des déplacements, de superpositions.

 

Avec cette série, l’artiste nous livre un récit du pouvoir dans une continuité vertigineuse que ponctue une certaine redondance. Mais, à y regarder de plus près, si les vues se succèdent, toutes se complètent et sont les acteurs d’une écriture plastique prolixe qui devient fascinante à force de logique. Les clichés se scandent en images dont chacune reprend sous une forme différente la même définition. Le répétitif n’est pas là recherche d’identité mais façon de marquer la totalité de l’espace défini par le photographe.

Une dialectique nait de cette succession de fragments et de traces qui forment un ensemble construit autour de la mémoire d’un lieu – la banque – ou de la représentation d’une démocratie aujourd’hui presque décadente. La réalité prend forme autour des images et s’ouvre sur une interrogation pour tenter de voir pourquoi ces lieux de pouvoir fascinent encore aujourd’hui.

 

Francoise  Docquiert